Pour la dernière fois de leur existence, les actuelles instances représentatives du personnel, le CHSCT et le Comité d'Entreprise, ont eu à rendre leur avis au sujet de la « charte des intercontrats » produite par la direction. Nous ne pouvons qu'applaudir à la position qu'elles ont adoptée : le CHSCT a rendu un avis en majorité négatif par 3 voix contre 2, suivi en ceci par le CE, qui a également opposé un avis négatif par 4 voix (2 CGT – 1 CGC – 1 sans étiquette) contre 2 voix favorables avec des réserves (FO).

Pourquoi ce document, qui dit vouloir préciser les obligations des salariés en intercontrat, suscite-t-il notre opposition ?

La direction licenciait déjà des salariés pour des motifs des plus futiles.

En janvier 2019, TCS comptait 75 salariés en inter-contrat, contre 162 en janvier 2018. Leur nombre a bien diminué. Nous demandons à la direction de nous communiquer les informations pour savoir par quels moyens elle a pu opérer cette amélioration du taux d'intercontrat.

Cette charte, selon nous, fournira à la direction un moyen supplémentaire de piéger les collaborateurs en inter-contrat afin de faciliter leur licenciement. Certaines des obligations qu'instaure ce document nous semblent aller dans ce sens.


Par exemple, le salarié qui effectuera son intercontrat à domicile aura pour obligation de consulter ses e-mails professionnels une fois le matin entre 9 h 00 et 10 h 00, et une fois l'après-midi entre 14 h 00 et 15 h 00. A quoi bon imposer cette contrainte inutile, puisque la charte prévoit que le manager pourra entrer en contact avec le salarié via sa messagerie ou son téléphone personnels si le salarié a donné son autorisation de les utiliser ?


Le salarié pourra « exceptionnellement » prendre un rendez-vous personnel sur l'horaire collectif de l'entreprise (9h00-12h00, 13h00-17h30) s'il demeure en capacité de respecter la précédente obligation. S'il n'est pas équipé pour consulter à distance ses e-mails professionnels, il sera de ce fait assigné à résidence deux fois par jour, qui couperont ses demi-journées.


S'il rencontre des difficultés à se connecter à sa messagerie professionnelle - ce qui est très fréquemment le cas ! -, il devra se présenter chaque jour dans les locaux de l'entreprise. Autant dire qu'il se déplacera tous les jours, même si ce sera uniquement pour apprendre sur place qu'il n'y a rien de nouveau pour lui !


Toutes les deux semaines, le manager établira un plan de travail définissant les actions à mener par le salarié en intercontrat, les formations à suivre, les contacts à prendre… Toutes les deux semaines, un échange (autrement dit : un contrôle) aura lieu sur l'état d'avancement de ce plan d'action ; le salarié devra transmettre un document indiquant l'historique des sollicitations des acteurs business : commerciaux, « delivery », RMG... L'encadrement disposera ainsi du moyen d'imposer au salarié des obligations supplémentaires susceptibles de le contrarier, de le mettre en difficulté ou de le prendre en défaut.

Les élus ayant rendu un avis négatif ont fait valoir les carences de cette charte :

- Elle n'indique pas les moyens qui seront alloués au salarié en intercontrat pour se former et s'informer de manière soutenue, et pour accomplir les tâches qui lui seront demandées. Elle ne prévoit pas de mettre à sa disposition un poste de travail avec accès à l'intranet de l'entreprise, avec les outils correspondant à son profil, à son expertise...


- Elle ne tient aucun compte des préconisations de l'expertise SECAFI sur l'intercontrat de longue durée, notamment sur la cellule provisoire de mobilité et d'employabilité ; rien n'a été fait à la suite de cette expertise. L'accord sur la GPEC, lui aussi, n'est toujours pas mis en œuvre, alors qu'il apporte une réponse à l'intercontrat.


- Elle n'assure aucune garantie au salarié quant à une affectation correspondant à son profil, à ses compétences et à ses perspectives d'évolution. Elle parle vaguement de concilier l'intérêt du salarié en matière de développement de carrière avec celui des projets et des missions, ce qui n'engage la direction à aucune obligation en ce sens.


- Elle ne prend pas en compte la période d'intercontrat dans les objectifs d'atteinte du variable...


La direction ne manifeste que peu d'intérêt pour l'aspect humain de l'intercontrat. Après quatre années d'alertes remontées par les représentants du personnel et par la médecine du travail au sujet de certains salariés en souffrance, elle continue d'agir avec le même état d'esprit.

Pour traiter l'intercontrat de longue durée, elle n'aurait pour seule réponse que continuer sa gestion délétère, officialisée dans une charte qui sera intégrée dans le règlement intérieur. Il apparaît que plutôt que d'investir pour sortir les salariés de l'intercontrat, il se pourrait qu'elle attende ou qu'elle crée les conditions de la faute pour les licencier.

C'est pourquoi, nous devons remercier les élus qui, en rendant un avis négatif, ne se seront pas rendus complices de cette manœuvre.


Cet avis négatif n'aura malheureusement pas pour effet de bloquer la mise en application de cette charte, mais il aurait été fâcheux que la direction puisse licencier un salarié en se fondant sur le non-respect de l'une de ses clauses, tout en rappelant que la charte aurait été approuvée par les représentants du personnel !


Vigilance et persévérance.